TRÉSOR DE BIBLIOTHÈQUES # 14

Alonso de Cartagena, Esta es la Genealogía de los reyes d’España Alphonsi de Cartagena episcopi Burgensis regum Hispanorum Romanorum imperatorum summorum pontificum nec non regum Francor[um], Anacaephaleosis [trad. Juan de Villafuerte], folio 147v, XVe siècle (1450-1475)
[4] h.+210 f.+[2] h. : papier ; 300×220 mm
Real Biblioteca, Madrid [RB, ms. II/3009] © Patrimonio Nacional de España

Retrouvez ici la notice du manuscrit sur le site de la Real Biblioteca.

Note : 5 sur 5.

Texte : Nuria Torres Santo Domingo, directrice de la Real Biblioteca.

L’auteur de cette histoire de l’Espagne, Alonso García de Santa María, était d’origine juive. Son père occupait une position importante dans sa communauté, puisqu’il était grand rabbin de Burgos. Mais il se convertit au catholicisme à l’âge adulte en adoptant ce nouveau nom. Après la mort de son épouse, son père opta en effet pour la voie de la nouvelle religion, devenant évêque de Burgos, poste auquel lui succéda son propre fils en 1435. Dès lors, ce dernier s’appellera Alonso de Cartagena (Alphonse de Carthagène).

Notre auteur reçut une éducation soignée, à Salamanque, et devint docteur en droit civil. Il fut considéré comme un juriste renommé, ainsi que comme un homme de lettres. En outre, il participa activement à la vie politique, devenant un véritable homme d’État. Il fut ambassadeur auprès du roi de Castille, résolvant avec succès des conflits avec le Portugal, et un représentant actif au Concile de Bâle, où il excella par ses discours. Il fut doyen de Saint-Jacques-de-Compostelle et de Ségovie, nonce apostolique à partir de 1418 et collecteur général jusqu’en 1427.

Après une carrière littéraire prolifique, il rédigea, à la fin de sa vie, en 1456, un recueil historiographique en latin, consacré à la monarchie espagnole, depuis le premier roi wisigoth à régner dans la péninsule, Athanaric, jusqu’aux deux premières années du règne d’Henri IV. Il s’agissait d’un recueil d’histoire destiné à fournir au roi Jean II, à qui il était dédié à l’origine mais qui était mort avant d’avoir pu voir l’œuvre terminée, une source directe et facilement consultable des événements les plus importants de l’histoire d’Espagne. Il peut être considéré comme un vade-mecum de l’histoire nationale et est généralement reconnu comme la dernière œuvre d’Alphonse de Carthagène.

Écrit en latin, l’ouvrage a été traduit en espagnol quelques années plus tard, en 1463, par Juan de Villafuerte. Celui-ci ne s’est pas limité à être un simple traducteur, puisqu’il a introduit des gloses dans le corps du texte de Carthagène. Il a par ailleurs réorganisé le texte et établit des divisions, sous forme de rubriques rédigées dans un nouveau style.

Le texte est divisé en deux parties, qui sont conçues différemment. La première partie comprend sept chapitres, de longueurs similaires, qui introduisent le lecteur à l’histoire primitive de l’Espagne, jusqu’à l’arrivée des Goths. Quant à la seconde partie, constituée de 85 chapitres, elle retrace la généalogie des rois, en conservant un schéma commun. Dans chacun d’eux, l’auteur résume les événements du règne et termine par la mention des papes, des empereurs romains et des personnages ecclésiastiques importants. Plus tard, il ajoutera les rois de France et les évêques de Burgos.

Notre exemplaire est l’une des rares traductions existantes et ne comporte pas d’apostilles. Sa caractéristique la plus remarquable est frappante : 84 dessins à la plume en noir et rouge, répartis dans tout le texte, qui suivent le récit historiographique de l’auteur et ont été décrits comme « la première et probablement la plus intéressante illustration graphique de l’Histoire d’Espagne que l’on puisse connaître ». (Tormo, Elías (1917). L’ancienne série emblématique des rois d’Espagne. Madrid).

Il s’agit d’un manuscrit de présentation, sans doute pour une personnalité notable de la cour ou pour un prélat.

Sa provenance est également remarquable : ce manuscrit appartenait à la bibliothèque de Don Diego Sarmiento de Acuña, 1er comte de Gondomar, ambassadeur de Philippe III à Londres. Il réunit une importante bibliothèque à Valladolid, dont une grande partie se trouve désormais à la Bibliothèque royale.