EXPOSITION # 38

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Note : 5 sur 5.

Un musée pour l’École. La collection d’antiques de l’École française de Rome

Dans le cadre du cent-cinquantième anniversaire de l’École française de Rome, se tiendra une exposition intitulée « Un musée pour l’École. La collection d’antiques de l’École française de Rome », accueillie dans la galerie située au 62 place Navone, siège de l’École. Sous le commissariat des archéologues Christian Mazet et Paolo Tomassini, l’exposition sera ouverte au public du 29 mai au 20 décembre 2024 [ndlr : prolongation jusqu’au 17 mai 2025]. La collection présente un ensemble inédit exposé pour la première fois, de près de 200 objets archéologiques d’époque romaine, sculptures, terres cuites, vases grecs et étrusques, ainsi que des documents d’archives de l’École française de Rome et des inventaires du mobilier du palais Farnèse.

En 1875 naissait officiellement l’École française de Rome. Son premier directeur, Auguste Geffroy (1820-1895), constitua une riche collection d’antiquités destinée à la formation des jeunes historiens et archéologues accueillis en Italie. Près de 150 ans après, cette collection quitte temporairement le palais Farnèse pour être exposée au public, et le musée imaginé pour l’École devient enfin réalité.
Les premières fouilles officielles de l’École française de Rome eurent lieu en février 1878 dans le sanctuaire d’Hercule à Palestrina, souhaitées par Auguste Geffroy et menées par Emmanuel Fernique (1854-1885). La collection d’antiques conserve de nombreuses terres cuites votives étrusco-latiales qui en sont issues, datées du IVe au IIe siècle av. J.-C., conservées en leur état de sortie de fouilles et qui sont les témoins des pratiques religieuses de la période républicaine : fragments de statues, têtes votives, statuettes, figurines animales et ex-voto anatomiques.
Une partie importante de la collection fut consacrée, dès sa formation, à la sculpture antique. Dès la fin des années 1870, plusieurs fragments de statues en ronde-bosse et des bas-reliefs ont embelli les salons du deuxième étage du palais Farnèse, achetés sur le marché antiquaire de Rome par Auguste Geffroy. Un exceptionnel sarcophage paléochrétien orne encore les murs de la loggia. Ces sculptures constituent un important témoignage de plus de six siècles d’histoire de l’art romain, du IIe siècle av. J.-C. au IVe siècle ap. J.-C.
La collection contient une trentaine de vases grecs et étrusques que le marchand romain Augusto Castellani (1829-1914) donna à l’École en mars 1879. Ils proviennent sans doute, en grande partie, des fouilles des frères Calabresi dans la nécropole étrusque de la Banditaccia à Cerveteri. On y trouve une sélection de céramiques à figures noires et rouges, ainsi que des vases en impasto et bucchero nero, illustrant la richesse et la bigarrure des productions grecques importées et étrusques. Certains vases ont été restaurés au XIXe siècle avant d’entrer dans la collection de l’École. D’autres constituent des assemblages, voire de véritables pastiches, qu’une nouvelle restauration est venue révéler.
Dans le musée conçu par Auguste Geffroy, un ensemble était constitué d’un amoncellement d’objets archéologiques, principalement sous forme de fragments, rassemblés pour la diversité des matériaux et des typologies. Ce lot éclectique reflète le désir de réunir une collection destinée à être manipulée et étudiée. L’objectif principal était de mettre les objets archéologiques à disposition des membres de l’École, afin qu’ils puissent s’imprégner de la matière dont ils étaient composés, comprendre leurs techniques de production et saisir l’habileté des artisans de l’Antiquité. Cette approche s’inscrit pleinement dans la définition de la formation universitaire en archéologie telle qu’elle est formalisée en France à la fin du XIXe siècle.
Auguste Geffroy rassembla plus de 300 pièces : vases grecs et étrusques, matériel des premières fouilles de l’École, sculptures et petits objets d’époque romaine. Cet ensemble représente un moment spécifique de l’histoire de l’archéologie et des collections d’antiquités dans les premières décennies de l’Italie unifiée. Quelques objets remarquables étaient exposés au palais Farnèse, à la vue du personnel et des visiteurs qui fréquentaient les lieux. Pendant la pandémie, l’étude de l’ensemble de la collection a été reprise dans une perspective de conservation, de restauration et de valorisation. L’exploration des archives et l’analyse des objets permettent d’en reconstituer l’histoire, de sa formation à sa fortune.

Fondée en 1875, l’École française de Rome est un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel, placé sous la tutelle du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. L’École française de Rome a pour mission fondamentale la recherche et la formation à la recherche dans le champ de l’histoire, de l’archéologie et des sciences humaines et sociales, de la Préhistoire à nos jours. Son domaine d’intervention privilégié couvre un espace comprenant Rome, l’Italie, le Maghreb et les pays du Sud-Est européen proches de la mer Adriatique.
L’École française de Rome est présente depuis la fin du XIXe siècle sur divers grands sites archéologiques. L’archéologie fut au cœur de ses missions dès sa création, entre 1873 et 1875, d’abord au Maghreb, puis en Italie, surtout après la Seconde Guerre mondiale, et dans les Balkans. Aujourd’hui, elle mène une trentaine de campagnes archéologiques dans cinq pays de la Méditerranée. De la Préhistoire à la période médiévale, l’École prend une part active au débat international sur la pratique de l’archéologie.

Note : 5 sur 5.

UNE SÉLECTION D’ŒUVRES

présentées par Christian Mazet et Paolo Tomassini,
archéologues, commissaires de l’exposition.

Note : 5 sur 5.

Une amphore étrusque

Amphore étrusque à figures noires attribuée au Groupe de la Tolfa
3e quart du VIe s. av. J.-C.-vers 530 – Dimensions : H. 32 ; l. 21
Production : Cerveteri – Provenance : Cerveteri ?
École française de Rome – Inv. EFR.1964.25 © École française de Rome

Cette amphore, donnée à l’École française de Rome en 1879 par le marchand romain Augusto Castellani (1828-1914), aurait été découverte dans les nécropoles de Cerveteri. Exécutée grâce à la technique des figures noires, fabriquée dans une argile brun pâle, elle a été produite en Étrurie au cours de la deuxième moitié du VIe siècle avant J.-C. Elle est attribuée au Groupe de la Tolfa, un atelier de peintres qui tire son nom de l’aire géographique où aurait été découvert l’un des premiers vases identifiables de leur corpus : les monts de la Tolfa, massif montagneux à la frontière des territoires des cités maritimes de Cerveteri et Tarquinia. Le col du vase est décoré d’une frise végétale de lierre. À la jonction du col et de l’épaule, après l’anneau plastique, une frise de languettes en forme de godrons de couleur rouge et noir en alternance introduit la scène représentée, identique sur les deux faces du vase : l’affrontement de deux griffons, créatures hybrides ailées au corps d’aigle et de lion. Le peintre a souligné en couleur rouge surpeinte les rémiges intérieures de leurs ailes, les pattes situées les plus en arrière de la composition, créant un effet de profondeur, ainsi que leurs langues pendantes et leurs oreilles de cheval. La panse est décorée de deux larges bandeaux en vernis noir, soulignés par trois bandes, qui encadrent une frise de postes interrompue, ponctuées de motifs de pétales en couleur blanche surpeinte. La base de la panse est décorée d’arêtes rayonnantes et présente une restauration en plâtre à la jonction entre le corps du vase et le pied, lui-même très probablement restauré puis repeint. Comme sur plusieurs exemplaires d’amphores du Groupe de la Tolfa, le vase présente sur une grande partie de sa panse un large coup de feu.

Note : 5 sur 5.

Une tête d’homme

Tête masculine imberbe en terre cuite
Fin IVe – début IIIe s. av. J.-C. – Dimensions : H. 18 ; L. 12 cm
Production : Palestrina – Provenance : Palestrina, sanctuaire d’Hercule
École française de Rome – EFR.1964.60 © École française de Rome

Cette tête de statue en ronde-bosse, vestige d’une sculpture plus grande, a été mise au jour lors des fouilles menées en 1878 par l’archéologue Emmanuel Fernique pour l’École française de Rome, dans le sanctuaire d’Hercule à Palestrina. Fracturée au niveau du cou, exécutée au moule et à la main, elle présente une chevelure courte et bouclée finement retouchée à l’outil comme certains détails des narines et des oreilles. Un fragment de vêtement, visible au niveau de la cassure sur l’épaule gauche, évoque une toge. Conservée encore à l’état de sa sortie de terre, elle se distingue par la préservation de traces de préparation blanche et de carnation rouge, témoignant de sa polychromie d’origine. Attribuée à une production étrusco-latiale, probablement locale, cette œuvre peut être datée de la fin du IVe au début du IIIe siècle av. J.-C., grâce à son style influencé par la tradition classique. Elle aurait servi d’offrande votive, représentant un fidèle, très probablement le dédicant lui-même.

Note : 5 sur 5.

Une façade de sarcophage

Façade de sarcophage paléochrétien à thème pastoral
Dernier quart IIIe s. ap. J.-C. – Dimensions : L. 213 ; l. 57
Production : Rome – Provenance : marché romain des antiquités (quartier de Macao)
École française de Rome – EFR.2023.69 © École française de Rome

Ce sarcophage en marbre, dont seule la face antérieure est conservée, correspond à la typologie des sarcophages dits « pastoraux ». Il appartient à la première phase des sarcophages à thème chrétien connus en Italie centrale, représentant des images bien attestées du répertoire païen sans référence directe et explicite au monde chrétien. La symbolique de l’image repose sur l’association entre l’iconographie du berger et le bon berger de l’Évangile. La signification de ce thème est accentuée par sa déclinaison sous plusieurs formes dans les différentes scènes : au centre, la défunte occupe la place principale, vers laquelle convergent les regards des deux bergers situés aux extrémités du sarcophage. De nombreuses ressemblances stylistiques – notamment dans le traitement des arbres et des brebis – sont observables entre le sarcophage et deux autres sarcophages également conservés à Rome, au Museo Nazionale Romano (celui de Iulius Achilleus, lié à l’iconographie païenne) et aux Musées du Vatican (le sarcophage dit à « grande pastorale »). On peut en déduire une datation commune, au dernier quart du IIIe siècle ap. J.-C., et émettre l’hypothèse qu’un même atelier ait été à l’origine de ces productions. De toutes les sculptures romaines et paléochrétiennes de la collection d’antiques de l’École française de Rome le sarcophage est le seul dont on connait l’origine : il a été acheté par Auguste Geffroy sur le marché romain des antiquités lors de son premier mandat de directeur de l’institution (1875-1882), plus précisément dans le quartier de Macao (ou Maccao) situé entre les Thermes de Dioclétien, la Porta Pia et le camp militaire de Castro Pretorio. Depuis lors, il a toujours été exposé sur la loggia du palais Farnèse.

Note : 5 sur 5.

INFORMATIONS PRATIQUES

Quoi ?
Un musée pour l’École. La collection d’antiques de l’École française de Rome

Cette exposition est organisée par l’École française de Rome, avec le soutien du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, et en collaboration avec l’association des Amis de l’École française de Rome et du réseau des Écoles françaises à l’étranger.
Commissariat : Christian Mazet, archéologue, céramologue et historien de l’archéologie, spécialiste de la culture matérielle grecque et préromaine et de l’histoire des collections d’antiques au XIXe siècle, et Paolo Tomassini, archéologue, spécialisé dans l’étude du décor et de l’architecture antiques d’époque romaine.

Comment ?
Pour construire un dialogue entre le passé de l’École, le présent de l’exposition et le futur de la recherche et de la valorisation de la collection, l’exposition est également présentée sous une forme virtuelle, avec des modèles 3D projetés sous forme d’hologrammes, des vidéos sur écrans et des QR-codes permettant d’accéder au catalogue en ligne de certains objets. L’exposition virtuelle et la base de données sont visibles ici.
Une visite guidée virtuelle de l’exposition, sous forme de vidéo, est également disponible sur le site de l’École française de Rome.
Pour accompagner l’exposition, une monographie de référence, première publication scientifique entièrement dédiée à la collection archéologique de l’École française de Rome, a été conçue par Christian Mazet et Paolo Tomassini, anciens membres de l’École française de Rome de la section Antiquité.