Maisons de plaisance des environs de Paris
Musée du Domaine royal de Marly
11 avril – 31 août 2025
musee-domaine-marly.fr
🇫🇷

PRÉSENTATION
Maisons de plaisance des environs de Paris
de Louis XIV à Napoléon III
[Extraits du dossier de presse]
S’évader un temps de la ville pour profiter du calme et de l’air pur de la campagne… Ce phénomène ne nous est pas étranger et fait sens à l’heure où l’exode urbain prend de l’ampleur. La villégiature n’est pourtant pas une habitude récente. Dès la Renaissance, en Ile-de-France, une élite fortunée quitte la ville à la belle saison et s’installe dans de somptueuses résidences « aux champs » pour s’y détendre et s’y divertir. Estampes, peintures et objets des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles témoignent de cette histoire qui a contribué à façonner les paysages franciliens. Souvent méconnus et peu valorisés, les vestiges de la villégiature francilienne se trouvent au cœur de problématiques actuelles en termes de préservation du patrimoine.
Situées « aux champs », les demeures de plaisance franciliennes permettaient à une élite fortunée de quitter Paris lors de la belle saison et de se détendre dans un environnement champêtre loin du tumulte de la ville. Maisons de campagne, villas, folies, pavillons, maisons de plaisance…, les termes désignant ces constructions sont nombreux. Ils ont varié au cours du temps et regroupent diverses typologies d’architectures et de situations, l’emplacement idéal restant la « campagne » proche de la ville. Les maisons de plaisance sont bâties tout autour de la capitale, des faubourgs aux confins de la région. Riche en forêts, vallées et cours d’eau, et équipée d’un réseau routier favorisant les connexions avec la capitale, l’Ile-de-France offre des conditions favorables à l’implantation de maisons de plaisance. La construction de ces édifices débute réellement à partir du XVIIe siècle et connaît un véritable essor au cours du siècle suivant. Elle se poursuit tout au long du XIXe siècle, dans un contexte d’industrialisation et de transformations sociales et urbaines qui en modifient les enjeux.
Le parcours de l’exposition invite le public à redécouvrir les maisons de plaisance les plus remarquables des environs de Paris, véritables témoins de l’histoire, qui mêlent art de vivre, décors raffinés, jardins sophistiqués, réceptions et promenades dans des sites naturels. Qu’elles soient disparues, réhabilitées ou encore à l’avenir incertain, ces résidences façonnent encore aujourd’hui les paysages franciliens et offre un regard précieux sur une époque où raffinement et nature étaient au cœur de la vie quotidienne. Les œuvres présentées montrent les transformations sociales de la fin de l’Ancien Régime et du XIXe siècle : divertissements en vogue, désir d’intimité et de confort, place des femmes dans ces espaces de villégiature, et essor de la bourgeoisie.
Souvent méconnus et peu valorisés, les vestiges de la villégiature francilienne de cette période se trouvent au cœur de l’actualité. Ces bâtiments, pour certains encore préservés, se trouvent aujourd’hui face à diverses problématiques de conservation, d’adaptation aux nouveaux besoins, d’accueil du public, etc., mais sont également menacés par les transformations urbaines qui répondent aux évolutions de la société du XXIe siècle. À l’heure du Grand Paris, où l’expansion métropolitaine englobe de nombreuses anciennes résidences de villégiature, de nouvelles réflexions émergent sur les liens entre la ville et ce patrimoine qui en était autrefois éloigné.
UNE SÉLECTION D’ŒUVRES
Proposées par Helga Briantais Rouyer, commissaire de l’exposition,
conservateur délégué des antiquités et objets d’art des Yvelines
et Francesco Guidoboni, chargé de mission au
Pôle Sauvegarde et Transmission des Patrimoines des Yvelines
Le château de Saint-Hubert

Ange-Jacques Gabriel (Paris, 1698 – Paris, 1782),
Domaine de Rambouillet. Plan du château et village de Saint-Hubert, 1770
Plume, encre et aquarelle sur papier
Archives départementales des Yvelines, A Sup54 © Département des Yvelines
La seconde section de l’exposition présente un très grand plan, prêté par les Archives départementales des Yvelines, figurant le projet d’Ange-Jacques Gabriel (Paris, 1698 – Paris, 1782) pour le château et le village de Saint-Hubert.
La tradition rapporte que Louis XV et Madame de Pompadour, chassant ou se promenant en forêt de Rambouillet, seraient arrivés sur les bords de l’étang du Pourras, un plan d’eau artificiel faisant partie de la chaîne des étangs de Hollande, aménagée à la demande de Louis XIV pour alimenter en eau les jardins du château de Versailles. Le site fait alors partie du duché-pairie de Rambouillet, propriété du duc de Penthièvre, petit-fils de Louis XIV et de Madame de Montespan. Qu’importe, le Roi, séduit par le paysage, décide de s’y faire construire un pavillon de chasse. Passionné de vénerie, il n’aura ainsi plus à abuser de l’hospitalité de son cousin, lequel lui offre d’ailleurs généreusement le terrain nécessaire à la réalisation de son projet. Grâce au soutien de la marquise de Pompadour, Ange-Jacques Gabriel, Premier architecte du Roi, entreprend en 1755 la construction d’un simple pavillon de chasse. Au fil des années jusqu’en 1770, le roi fait agrandir et embellir l’édifice, qui se transforme peu à peu en une véritable résidence royale : une élégante maison de plaisance et de chasse, ouverte sur l’étang.
Daté de 1770, le plan d’Ange-Jacques Gabriel est magnifiquement aquarellé. Le Premier architecte du Roi, qui vient d’achever la chapelle royale du château de Versailles et le Petit Trianon, est au fait de sa gloire et a toute la confiance du Roi. Il dessine ici son projet d’agrandissement pour Saint-Hubert. Ce château à la française, édifié entre 1755 et 1758 « entre cour et jardin », et dont l’avant-corps central devait marquer la présence d’un grand salon, illustrait parfaitement le goût pour la symétrie et le style rationnel de Gabriel. Le jardin est en réalité ici remplacé par l’étang, alimenté par la Rigolle au Roy. De fait, la façade sud du corps central donne directement sur un embarcadère afin de faciliter les promenades en barque. Seuls deux grands parterres, présentés sur le plan en deux variantes — « à la française » et selon la nouvelle mode des serpentines symétriques — encadrent la façade nord de ce même corps central. Au-delà, côté nord, les ailes des communs, encadrées de petits pavillons carrés, bordent une avant-cour ouverte sur l’axe central d’une patte d’oie à sept branches. Les branches les plus à l’est mènent vers le bourg, resté inachevé, et son église, jamais construite. Ce plan mentionne également les parcelles déjà acquises par la Couronne, celles restant à acquérir, ainsi que les lots accordés par brevet ou réservés. Ce projet de Gabriel préfigure le « grand dessein » de reconstruction de Versailles, jamais achevé.
Le village de Montreuil

Anonyme, Le pavillon de musique de la comtesse de Provence à Versailles,
seconde moitié du XVIIIe s.
Aquarelle sur trait de plume sur papier
Département des Hauts-de-Seine / Château de Sceaux, musée départemental, INV. 91.32.1
© Département des Hauts-de-Seine
Versailles ne fait pas exception dans le mouvement d’expansion des demeures de plaisance et constitue même, entre la fin du XVIIe siècle et la Révolution, l’un de ses lieux de développement privilégiés. Notamment, l’annexion du village de Montreuil à la ville de Versailles, par un édit de Louis XVI datant d’août 1787, favorise l’urbanisation de l’ancien bourg et la mise en œuvre de quelques travaux d’embellissement, faisant de ce village le lieu privilégié de la villégiature des grandes dames de la Cour.
La comtesse d’Estrades, favorite du marquis d’Argenson, ministre de la Guerre de Louis XV, dispose à l’entrée de Montreuil et au pied de la butte du Montbauron, d’un pavillon flanqué d’une aile abritant une serre avec un jardin remontant en pente vers le haut de la colline (aujourd’hui connue sous le nom de « villa Moricet »). En 1777, Madame de Viviers, comtesse de Vergennes, acquiert une maison de campagne bordant l’avenue de Paris (aujourd’hui située au n°68 de l’avenue). Il s’agit d’une propriété comprenant une grande maison, cours, basses cours et plusieurs autres bâtiments, et entourée d’un jardin agrémenté d’un canal d’eau vive, d’allées plantées de tilleuls, de bosquets, d’arbres fruitiers, de parterres, de prés et potagers et d’une glacière. La maison de plaisance est alors mise au goût du jour par la nouvelle propriétaire.
À la suite de Madame d’Estrades et de la comtesse de Vergennes, ce sont bien d’autres personnalités de la Cour qui s’installent dans les environs de Montreuil. La comtesse de Provence acquiert en 1781 une maison dans le Grand Montreuil, ancienne propriété du prince de Montbarrey, maréchal de camp et surtout l’un des premiers à acquérir une modeste demeure dans le village, installée au milieu d’un verger. La comtesse quant à elle se constitue un vaste domaine par l’acquisition successive de multiples jardins sur plus d’une douzaine d’hectares. L’habitation est réaménagée par l’architecte Jean-François-Thérèse Chalgrin, intendant des Bâtiments du comte de Provence, ainsi que le parc anglo-chinois, ponctué de nombreuses fabriques parmi lesquelles une chaumière, un belvédère, un temple de Diane et une pagode chinoise. L’eau alimentant le jardin, et notamment une rivière agrémentée de trois îles, est acheminée depuis la butte du Montbauron. Le parc est aussi pourvu d’un pavillon de musique hexagonal, construit en 1782 par Chalgrin, toujours en place dans l’actuel quartier Chauchard.
Le dessin aquarellé provenant de la collection du Musée départemental de Sceaux, nous montre ce pavillon de musique immergé dans un paysage champêtre. Le plan centré, couronné d’un petit dôme avec éclairage zénithal, les façades décorées de refends, la grande serlienne surmontée d’un fronton majestueux, font de ce pavillon un chef d’œuvre de l’architecture « à la grecque » de la fin du XVIIIe siècle. Ce vaste ensemble comprenant demeure d’agrément et jardin paysager correspond pleinement aux archétypes des demeures de plaisance, qui fait ici fortement écho aux aménagements du Hameau de la Reine au Petit Trianon.
Le domaine de Madame Élisabeth

Anonyme, Plan du changement proposé pour la maison de Madame Elisabeth
sur l’av. de Paris, à Versailles, 1787
Plume, encre de chine et aquarelle sur papier
Archives départementales des Yvelines, A1476-3
© Département des Yvelines
La constitution du futur Domaine de Madame Élisabeth à Montreuil s’inscrit dans ce développement de résidences d’agrément du village de Montreuil par ces grandes dames de la Cour. C’est à partir de 1764 que les princes de Rohan-Guéméné entament l’aménagement de leur propriété de Montreuil. À cette date, la princesse de Guéméné n’est dans un premier temps que locataire d’une maison qui appartient alors à Louise-Sophie Cook, sous-gouvernante des Enfants de France, ensuite rachetée en 1776. Alexandre-Louis Étable de La Brière, architecte des Bâtiments de la princesse de Guéméné, transforme et agrandit la maison et en dessine également le jardin. La maison de plaisance est entourée de dépendances, comprenant des grands communs construits autour de deux cours des cuisines et des écuries, une basse-cour, une vacherie, une laiterie et une « maison du jardinier ». À côté de ces anciens bâtiments, l’architecte élève un édifice contenant une vaste salle rectangulaire, servant d’orangerie. En 1782, il dessine et fait planter un jardin anglais avec « potager, rivière, antre des rochers, montagne », cette dernière offrant une vue sur le jardin, les environs immédiats et la vallée de Chaville. Encore, en bordure sud, une allée des tilleuls surplombe en terrasse le chemin de Versailles à Paris avec vue sur les étangs et prairies de Porchefontaine.
La même année 1782, les princes de Guéméné, en conséquence d’un train de vie fort élevé, font faillite personnelle et sont scandaleusement déclarés coupables de banqueroute. Ils sont obligés de se retirer de la Cour. Ainsi le 13 mai 1783, par l’intermédiaire de l’architecte Jacques-Jean Thévenin, le roi Louis XVI achète pour sa petite sœur, Élisabeth de France (1764-1794), dite Madame Élisabeth, pour la somme de 280 000 livres, la propriété des princes de Guéméné à Montreuil. Madame Élisabeth, alors âgée de dix-neuf ans, prend possession de sa nouvelle résidence à la fin du printemps 1783, s’installant dans l’appartement de la princesse de Guéméné, son ancienne gouvernante. Cependant, n’étant pas encore majeure, Madame Élisabeth n’avait pas le droit de coucher dans sa maison de campagne et elle devait chaque soir retourner dormir au château de Versailles. Une nouvelle campagne de travaux est lancée en 1786 par le comte d’Angiviller, directeur des Bâtiments du roi, pour transformer la maison en une demeure digne de la sœur du roi. Ces transformations sont alors confiées à l’architecte Jean-Jacques Huvé et conduites de 1788 à 1789 sous la supervision de l’inspecteur des Bâtiments du roi, Jean-François Heurtier.
Les documents d’archives témoignent du vif intérêt de Madame Élisabeth pour la transformation de sa maison de plaisance et de sa participation active dans la conception de nouveaux plans. Deux dessins provenant des collections des Archives départementales des Yvelines, sont les plans définitifs, approuvés en 1787. On prévoit le rattachement du nouveau commun à la maison, par une aile dont la longue façade régulière est décorée de lignes de refends, et dont le centre est orné d’un balcon porté par quatre colonnes. Une nouvelle cour est établie à l’est. L’entrée de la propriété se fait par un portail ouvert à l’est, sur la rue Émard. La distribution intérieure est complétement réorganisée et un nouvel appartement de réception est aménagé. Madame Élisabeth transforme également l’ancien commun des Guéméné en « petite maison détachée », aménagée en appartements réservés à ses amis. Elle occupera elle-même provisoirement le premier étage, pendant la durée des travaux de sa maison. En parallèle, le « nouveau commun » est réaménagé pour abriter l’Administration de la Maison de la princesse. L’intervention d’Huvé semble relativement limitée dans le jardin, n’apportant aucune modification majeure aux aménagements crées par La Brière pour les Guéméné. Néanmoins, il agrémente la promenade de nouvelles petites fabriques dont une grotte avec cascade, sous l’allée des tilleuls. Le jardin dispose également d’un potager et d’une pépinière sous la responsabilité du docteur Le Monnier, ami et voisin de la princesse, qui supervise la plantation d’essences nouvelles ou exotiques. Doté d’un assortiment remarquable de végétaux, choisis avec un soin et une science particulière, le jardin de Madame Élisabeth constitue sans aucun doute un des domaines de plaisance les plus remarquables de Montreuil.
Néanmoins, l’existence de cet enclos privilégié est relativement éphémère, puisque depuis sa mise en œuvre sous les Guéméné jusqu’au départ de Madame Élisabeth, il demeure en l’état une bonne dizaine d’années tout au plus. Le 6 octobre 1789, la famille royale est ramenée de force par le peuple à Paris. Madame Élisabeth suivra le sort de son frère et sera exécutée le 10 mai 1794.
INFORMATIONS PRATIQUES
Quoi ?
Maisons de plaisance des environs de Paris de Louis XIV à Napoléon III
Cette exposition est organisée par le musée du Domaine royal de Marly.
Commissaire : Karen Chastagnol, directrice du Musée du domaine royal de Marly, Helga Briantais Rouyer, conservateur délégué des antiquités et objets d’art des Yvelines et Francesco Guidoboni, chargé de mission au Pôle Sauvegarde et Transmission des Patrimoines des Yvelines.
Où ?
Musée du Domaine royal de Marly
1, Grille royale – Parc de Marly
78160 Marly-le-Roi
musee-domaine-marly.fr
Quand ?
Du 11 avril au 31 août 2025
Du mercredi au dimanche de 14h00 à 18h00
Sur le temps de l’exposition, le musée sera fermé le 1er mai, le 8 mai et le 14 juillet.
Combien ?
Tarif plein : 10 euros.
Tarif réduit : 7 euros.
Le billet donne accès aux collections permanentes.
Les informations concernant les tarifs réduits et les conditions de gratuité, ainsi que la billetterie en ligne, sont disponibles sur le site internet du musée.
Comment ?
Des visites guidées de l’exposition sont proposées par l’équipe du musée, ainsi que deux visites-conférences (24 mai et 18 juin).
