Le service Kioto
Abbaye de Belleperche – Musée des Arts de la Table
Cordes-Tolosannes, France
www.belleperche.fr
🇫🇷

Compotier du service Kioto
Creil ou Montereau, période Barluet, 1876-1884
Faïence fine imprimée et peinte, H. 9 cm, D. 22,6 cm
Marque : CREIL / MONTEREAU / KIOTO
Musée des arts de la table / CD 82. Inv. 2020.28.1.0
© Musée des arts de la table. Photo Jean-Michel Garric / CD 82
Texte : Jean-Michel Garric, chef de service, Abbaye de Belleperche – Musée des Arts de la Table.
Avec le célèbre service de table Rousseau, le service Kioto est l’une des deux créations emblématiques du courant japoniste dans les arts de la table français à la fin du XIXe siècle, parmi les plus originales. Il s’agit d’un service de dessert composé d’assiettes, de compotiers et d’un sucrier, complété par un service à thé. Kioto fut édité par Creil-Montereau durant la courte période durant laquelle Anatole Barluet (1802-1884), jusqu’alors directeur de Creil, a pris les rênes du groupe unissant les deux centres de production. Barluet privilégiait la recherche esthétique et l’innovation. En faisant primer la création artistique sur les impératifs économiques, il permit la création des pièces d’une grande qualité mais peu rentables à la commercialisation. Aussi, après le décès de Barluet, la création de la S.A. Creil-Montereau sonna le glas du service Kioto.
Le musée des arts de la table conserve un compotier et six assiettes, toutes différentes. Expression très aboutie du japonisme, Kioto est un jalon majeur de l’histoire des arts de la table français. L’auteur du modèle, anonyme, a choisi un fond coloré gris verdâtre rappelant les céladons tardifs qui relèvent en fait de l’art chinois, bordé d’une frise de méandres dorés et sur lequel se détache le trompe-l’œil d’un linge carré, brodé d’une légère guirlande végétale rose. Ce dispositif fait référence aux « d’Oiley », petits napperons adoptés en France sous influence britannique et que l’on plaçait, dans la seconde moitié du XIXe siècle, sur les assiettes à dessert pour les isoler des couverts au moment où l’on donnait l’ensemble aux convives après avoir desservi le repas.
Sur le napperon sont déposées, en léger relief également, des vignettes rectangulaires, des formes d’éventail ou de tsuba (garde des armes blanches japonaises), ornées de motifs variés, d’interprétations de peintures de fleurs et d’oiseaux, de scènes et de paysages. Contrastant entre elles par le dessin et les couleurs, elles semblent flotter sur un fond d’or poudré et se superposent. Il s’agit d’un jeu esthétique employé par les graveurs japonais, appelé kibori gakuawase sanzu (« rivalité des images encadrées »). L’auteur du service a bien assimilé ce principe et l’a rendu avec une rare sensibilité qui fait de Kioto une création d’un grand raffinement, loin des facilités de la production industrielle contemporaine que se contentait de transposer des motifs d’Extrême-Orient sur des formes occidentales.






Assiettes du service Kioto
Creil ou Montereau, période Barluet, 1876-1884
Faïence fine imprimée et peinte, D. 21 cm
Marque : CREIL / MONTEREAU / KIOTO
Musée des arts de la table / CD 82. Inv. 2020.28.1.0
© Musée des arts de la table. Photo Jean-Michel Garric / CD 82
