Instruction pour les bergers et les propriétaires de troupeaux, par Daubenton
Musée & parc Buffon
Montbard, France
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Daubenton, Instruction pour les bergers et les propriétaires de troupeaux, 1782, p. 473, pl. XX.
Coll. Musée Buffon © Musée & parc Buffon, Montbard
Texte : Tony Fouyer, directeur, musée & parc Buffon, Montbard.
Né à Montbard en 1716, rien ne destinait Louis Jean-Marie Daubenton à la carrière de scientifique qu’il a eu. Fils cadet d’un notaire local, son père l’oriente vers la prêtrise. Pour cela, Daubenton est envoyé au lycée des Godrans, à Dijon. À la fin de son cursus, il part pour la Sorbonne où il va étudier la théologie. Loin d’être enthousiaste à cette idée, il assiste en secret aux cours de médecine et aux démonstrations d’anatomie et de botanique dispensés par Winslow, Hunaud ou encore Antoine de Jussieu. La mort de son père va marquer un tournant pour Daubenton. Libre de faire ses propres choix, il devient docteur de la faculté de médecine de Reims. Pour exercer, il retourne à Montbard. Cette aventure ne dure que peu de temps. En 1742, Buffon – dont il connaît la famille de longue date – l’éloigne de Montbard pour le nommer officiellement « garde et démonstrateur du Cabinet d’histoire naturelle » en 1745. C’est le début d’une aventure qui liera les deux hommes dans l’histoire : l’Histoire naturelle, générale et particulière. Daubenton est reconnu de ses contemporains pour sa rigueur. Sa renommée l’amène à collaborer avec Diderot et d’Alembert. Il les accompagne dans la rédaction de près de 900 articles de leur Encyclopédie.
Les hommes au pouvoir en ont également conscience. En 1766, Trudaine, en tant qu’intendant des finances du roi Louis XV et président de l’Académie royale des sciences missionne Daubenton pour travailler sur les laines et sur l’amélioration des races de moutons. Comme le signale Roland de La Platière, dans un mémoire de 1779, la France ne produit pas la moitié des laines que son industrie drapière consomme. Leur qualité, moindre pour ce type de production, oblige les industriels à se fournir en Angleterre et en Espagne. Le coût pour la France est considérable. Pour cette entreprise, Trudaine va fournir un cheptel à Daubenton. Il va pouvoir expérimenter. Bien que n’étant pas le premier à publier sur le mérinos, devancé en cela par l’abbé Carlier, Daubenton a le mérite de s’intéresser à tous les aspects de l’animal.
Riche de ces expériences passées et à l’aide du contingent de moutons venus d’Espagne fourni par Trudaine en 1776, il démontre qu’il est possible de garder les mérinos en bonne santé et d’améliorer la qualité lainière. Pour le prouver, il est obligé de mettre au point un microscope pour distinguer la qualité et le degré d’amélioration des laines ; les données fournies à l’époque sont vagues et cela ne peut lui convenir. Le fruit de ce travail est consigné puis diffusé, à travers la rédaction de plusieurs mémoires :
– Mémoire sur le mécanisme de la rumination et sur le tempérament des bêtes à laine, 1768 ;
– Observations sur les bêtes à laine, parquées pendant l’année, 1772 ;
– Mémoire sur l’amélioration des bêtes à laine, 1777 ;
– Mémoires sur les laines de France comparées aux laines étrangères, 1779 ;
– Instruction pour les bergers et les propriétaires de troupeaux, 1782.
Bientôt, Bertier, l’intendant de la généralité de Paris, demande à Daubenton de faire une expérience à Alfort. Dans ce cadre, il fait produire « un drap de laine superfine du cru de la France ». Daubenton publiera les résultats de cette production en 1784, dans son Mémoire sur le premier drap de laine superfine du cru de la France. Le drap en question est présenté au roi par le contrôleur général des finances Calonne. Convaincu, Louis XVI décide d’associer Daubenton à la création de la bergerie royale de Rambouillet, puis à la formation de bergers. Bien que l’industrie lainière n’ait pas eu le succès escompté – le coton venant supplanter la laine et le lin –, les travaux de Daubenton sont aujourd’hui toujours lus et étudiés par les bergers et les zootechniciens.
