Cabaret à liqueurs
Abbaye de Belleperche – Musée des Arts de la Table
Cordes-Tolosannes, France
www.belleperche.fr
🇫🇷

Cabaret à liqueurs
Tôle de fer peinte et dorée, bois noirci, cristal moulé, étiquettes en métal émaillé
France, vers 1830, H. 31 cm ; D. 30 cm
Musée des arts de la table / CD 82. Inv. AT.2005.32.8
© Musée des arts de la table. Photo Jean-Michel Garric
Texte : Jean-Michel Garric, chef de service, Abbaye de Belleperche – Musée des Arts de la Table.
Ce cabaret, dit aussi « porte-liqueurs », appartient à la production massive d’objets en tôle peinte, de prix raisonnable, qui permit à de nombreux Français de s’équiper en biens de consommation courante au début du XIXe siècle. La verrerie est en cristal pressé-moulé, technique inventée en France en 1823 et industrialisée aux États-Unis en 1827, qui fit chuter les prix. La consommation des liqueurs fines spiritueuses était au XVIIIe siècle un plaisir raffiné, accessible seulement aux plus riches. Sirupeuses et parfumées, on donnait à ces boissons le nom de « crèmes », et leurs ingrédients, cannelle, badiane, vanille, rhum, jasmin, rose, abricot, citron, moka, fleur d’orange au petit-lait ou au champagne, thé… expliquent leur prix élevé. Elles étaient obtenues par macération de fruits, de fleurs, de plantes et d’épices dans les meilleures eaux de vie avec du sucre. En outre, on les laissait vieillir en cave afin d’en bonifier le goût par le développement des arômes. Sous l’Ancien Régime, ces boissons, conservées sous clefs dans des coffrets, étaient un grand luxe : « On ne les servoit qu’à la suite d’un grand repas, en petite quantité, dans de très petits verres » (Grimod de La Reynière, Almanach des gourmands, tome II, p. 197). L’essor de la profession de distillateur après 1790 accompagna une évolution du goût des consommateurs en faveur des liqueurs fortes, comme le kirsch. L’engouement fut tel vers 1800 que les liqueurs devinrent presque une denrée de première nécessité. Les plus communes étaient la crème d’absinthe, l’anisette de Bordeaux, le marasquin de Zara, le curaçao d’Amsterdam, le ratafia de Grenoble, le kirchswasser de Verdun, la liqueur de noyau et la crème de fleur d’orange. Chaque ménage détenait deux, trois ou quatre liqueurs différentes, offertes aux convives en fin de repas avec le café et des biscuits à tremper dans le verre. C’est pour répondre à ce courant de mode que l’on créa vers 1800 le cabaret à liqueurs avec sa ronde de petits verres tout autour du support. Vers 1820 apparaît la « cave à liqueurs », coffret de bois plus ou moins précieux et décoré, aux parois articulées, permettant de tenir les flacons sous clef à l’abri des tentations du personnel domestique.
